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A.P. de la contemplation: Cashback (première partie)

Il en est des œuvres comme des gens: on croit avoir tout vu, connaître toutes les ficelles et tous les clichés. Plus rien ne nous étonne, on se sent glisser vers une inévitable lassitude, et tout à coup…. le choc…

… une vrai surprise. Un tourbillon d’introspection qui arrive à garder à la fois fraîcheur et pertinence. Du beau conservant du propos. Je n’y croyais plus, Olivier Dubois me l’a pourtant offert (enfin bon, le réalisateur en fait, mais je ne me souviens plus de son nom).

Premier choc. Bon, je sais, vous n’avez pas le son. Mais Mozart arrive doucement sur cet écran noir, plein de tendresse mais aussi de nostalgie. Un tout petit moment de perfection, dès la première seconde, sans le moindre support visuel. Ça part bien, se dit-on.

Choc 2, on commence sans image. Par une phrase dont il est impossible de savoir s’il faut en rire ou s’en offusquer, le ton ne semble pas vouloir être décrypté. Ambiguïté. J’adore. *Pourlèchement de babines sur les notes du hautbois* Toujours pas d’image, et le film est déjà passé au niveau 2 (aka « je na zappe pas tout de suite »).

Petit retrait. On repasse en niveau 1,5. Veut-on vraiment me faire passer plus d’une heure devant les errements émotionnels d’un petit british (semble-t-il à l’accent) *Farfouillage dans le canapé pour récupérer la télécommande*

Choc 3. Les errements émotionnels d’Olivier Dubois, ça peut me retenir une heure. Et même deux s’il le faut. *Repose tranquillement la télécommande sur le canapé*

Surtout qu’Olivier Dubois vient de vivre la méga rupture. On se balance des objets gentiment achetés ensemble chez Ikea *ricane dans son canapé* Évidemment, je suis acheteuse. Un film qui démarre juste après la rupture, ça veut dire qu’on a sauté toutes les scènes de « on se rencontre à une soirée – on se regarde – trop le coup de foudre – on se tourne autour pendant 3/4 d’heure du film – on s’embrasse pendant 10 minutes du film – on est très heureux pendant 1/4 d’heure – générique de fin ». Non, là , on démarre quand ça devient intéressant. Merci, Olivier.

Pour info, à ce moment-là, on est en à 1 minute et 41 secondes. Vous êtes pas couchés.

Cette rupture parfaitement banale déclenche une question centrale pour Olivier (C’est Ben en fait dans le film. Il sera rebaptisé Olivier pendant tout ce commentaire. Toute réclamation est à garder pour soi.). En pleine cafétéria de la fac de beaux-arts, il se pose cette question éternelle et pourtant parfaitement oiseuse: finalement, nous aimions-nous? Pour répondre, encore faudrait-il que je sache ce qu’est l’amour. Donc, question: qu’est l’amour??
Bien sûr, je grogne dans mon canapé et repars à la chasse à la télécommande. Même pour Olivier Dubois, je ne me tape pas un film complet pour une question idiote et un poil rhétorique.

Mais voilà qu’on entre dans les heures sombres, d’un coup. Les « heures du tourment ». La nuit d’Olivier. L’heure des regrets, du manque et de la résignation. Sauf que pour Olivier, ça va plus loin. Après l’inévitable coup de fil ridicule à l’ex, le voilà qui sombre.

… dans l’insomnie.

(Hi hi hi la lampe Ikea cassée sur la table de nuit).

Le tourment devient absolu. Plus il désire que le temps passe vite, que l’oubli arrive, plus il devient imperméable au sommeil. Ce qui implique encore plus de temps réveillé, plus de temps pour penser à l’ex, aux regrets, à la souffrance. Devant ce tiers de vie supplémentaire subitement accordé, et pourtant si peu souhaité, il ne lui reste plus qu’à trouver une occupation qui arrive à l’extraire de ses pensées.

Choc 4. Au bout de 15 minutes, on change complètement d’environnement. Olivier intègre l’équipe de nuit du supermarché glauque du coin. Gné??? Totalement intriguée, étonnée, voire choquée de ce changement brusque de direction, j’enterre la télécommande. Film passé d’un coup en niveau 5, ça n’est pas arrivé depuis Fight Club.

Monsieur Dubois fait des natures mortes sur le sol du supermarché.

Monsieur Dubois imagine les clientes en biches sous les arbres.
Monsieur Dubois fatigue, quoi.

Et je vous passe les ultra-savoureux collègues, il faut quand même que vous ayez quelques surprises quand vous le regarderez. Car vous le regarderez. J’ai dit.

Mais, tout de même, on ressent toujours le propos sous-jacent.
Et là, choc 5. Le narrateur nous avait annoncé un thème sur l’amour, mais c’est l’écoulement du temps qui est inscrit en filigrane dans toutes les scènes. Ce temps qui n’en finit plus de se dilater dans ces nuits interminables d’ennui au supermarché. Tous les personnages sont pris dans cette quasi-immobilité du temps. La caissière met carrément un sparadrap sur sa montre en espérant ne pas subir ce ralentissement.

Et l’ennemi, ici, c’est l’horloge. C’est la Méduse: ne jamais, jamais la regarder dans les yeux…

En voulant passer son temps excédentaire plus vite en se trouvant une activité, Olivier se retrouve dans un lieu où il ne s’écoule que trop lentement. Visiblement, le temps ne veut pas lui laisser d’échappatoire.

Oh que non. Pas d’échappatoire du tout. Voilà que ça s’aggrave, et qu’Olivier se met à figer le temps. Lui seul continue à bouger dans ce monde parfaitement immobile. Il boira jusqu’à la lie le calice de l’arrêt du temps. Il savourera tout instant de ces heures tourmentées.
Il est coincé dans ce temps immobile, qui le force à faire la seule chose qu’il est encore capable de faire: observer, scruter, admirer, évaluer…. bref, contempler.

Voilà pour la première partie: on a lentement glissé des errements amoureux d’un post-ado pas bien dégrossi à une expérience sur l’écoulement du temps et sur la sensation physique de l’existence d’un temps dilaté. Si vous êtes sage, la semaine prochaine vous aurez la réponse à cette question qui, je le sais, vous hante: Mais où est donc le rapport avec le début??? Nandidiou!!!

… hik hik hik …. *plan laugh*

Posted by on Juin 26, 2008 in Choix et reviews du Dark Side | 20 comments

20 Comments

  1. Ca donne très très envie. Y aurait moyen que je te le récupère ?

  2. Of course, il est sur Dividi… C’est l’ambition du truc: je donne que le début comme ça les gens le regardent d’ici la semaine prochaine..
    Si tu veux je te le ramène ce soir?

  3. Ben ouais, je veux bien…

  4. Marge, je n’ai encore rien lu sauf le titre, mais saches une chose. Je t’aimeuh !!!

  5. *rougit*
    C’est un film magnifique, vraiment vraiment je vous le conseille. Sauf si vous êtes fan de Steven Seagal, auquel cas vous risquez de vous ennuyer un tantinet! 🙂

  6. D’ailleurs, il est pas sur le dvd le court ?

  7. En fait ce sont des extraits du long métrage. Il manque surtout l’introduction, en fait. C’est plus centré sur l’unique question du temps, un peu plus dense.

  8. Oué, enfin non, justement, le réal a repris le court qui a été fait en premier, et l’a complété un an ou deux après pour faire le long. Je m’en souviens parce que je les avais justement vu en festival à l’époque… 😉

  9. Toutafè, les images du court ont été recyclés dans le long à Postériori, c’est d’ailleurs un sacré tour de force deux ans après…

  10. J’ai rien compris, je ne sais pas même pas de quoi on parle mais je ne dirait qu’une seule chose

    Vive Marge * ne pas écrire A Bas la Sorcière*

  11. Voici donc notre Mr Dubois. Ben je t’en parlerai quand je l’aurai vu 😉

  12. Comme toujours, c’est un régal de lire les excellentes anotations dans la "Marge" de ce blog.
    Mission accomplie : je veux connaître la suite !

  13. Oh oui, j’ai vraiment beaucoup aimé ce film. Une vrai surprise.

  14. J’ai adoré ce film!!!
    Ma meilleure surprise de ces 5 dernières années.
    Il faut le voir absolument!

  15. Je vois que ça fait l’unanimité! Nous pouvons donc tous en ch? »ur encourager ceux qui ne connaissent pas encore à se laisser envoûter. Enjoy!

  16. Oui oui oui, moi aussi j’ai adoré ce film 🙂
    En plus je vis ma première insomnie depuis des années, ta review me parle donc spécialement cette nuit !

  17. Rah, maintenant je fais une rechute et j’ai pas le frakking dvd sous la main !!

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